Santé et sécurité du travail dans les mines
Prise de bec avec l’Association minière du Québec
par Éric Cyr
Le Syndicat des Métallos et l’Association minière du Québec (AMQ) sont en désaccord concernant les conditions de travail et la sécurité des travailleurs dans le secteur minier québécois. Une rupture qui aurait été initiée par l’AMQ a contribué à une recrudescence des accidents mortels (deux à ce jour en 2017) et avec blessés graves dans le domaine minier au Québec depuis le début de l’année.
À couteaux tirés
Le Syndicat des Métallos déplore le fait que des gens meurent pendant que les minières boudent les comités de prévention. « L’AMQ et les minières doivent cesser les enfantillages et collaborer pour la santé et sécurité du travail (SST). » Le directeur québécois des Métallos, Alain Croteau est cinglant : « Le carnage doit cesser dans les mines du Québec! Les minières doivent mettre fin à leur boycottage des comités de travail de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) qui dure depuis près d’un an et travailler sérieusement à améliorer la santé et la sécurité dans les mines. La ministre [québécoise] du Travail doit aussi mettre son poids dans la balance pour qu’il y ait un vrai coup de barre [en la matière]. » C’est le message lancé au lendemain d’un second décès dans les mines au Québec depuis le début de l’année et qui est appuyé par la majorité des présidents de sections locales du secteur minier de partout au Québec.
Mauvaise foi des minières
Voilà maintenant près d’un an que les sous-comités de travail de la CNESST n’ont pu se réunir faute de participation des représentants des minières, vraisemblablement à cause d’un mot d’ordre de l’AMQ. Cette abstention coïncide avec une ordonnance de la CNESST de cesser le travail de soutirage minier (le fait de retirer du minerai), lorsque des charges explosives sont installées ou prêtes à être déclenchées. « La CNESST est au courant, la ministre du Travail aussi, nous lui avons écrit en mai pour lui demander d’intervenir. Maintenant, l’hécatombe se poursuit et nous sentons que les minières ne sont plus du tout en mode prévention. Elles rejettent le modèle de comités paritaires qui a pourtant permis de faire des avancées majeures depuis 30 ans dans le secteur minier », fait valoir le syndicaliste. Un point de presse destiné à dénoncer la situation problématique s’est tenu devant le siège social de l’AMQ, qui représente les minières du Québec.
« Tout est paralysé en matière de prévention et d’élaboration de plan d’action en santé et sécurité du travail. Nous dénonçons l’AMQ, ce lobby des minières, ce syndicat des boss, qui semble avoir donné un mot d’ordre de bouder les comités de la CNESST parce qu’ils ne sont pas d’accord avec une ordonnance. Ils se livrent à des avocasseries et des enfantillages alors que des vies de travailleurs sont en jeu. On sent un relâchement en matière de santé et de sécurité au cours des dernières années. Les mines ont déjà été beaucoup plus meurtrières, le bilan s’était amélioré dans les 40 dernières années grâce à la prévention qui se fait en partenariat entre les employeurs et les représentants des travailleurs. Il ne faut pas revenir en arrière. La situation doit être redressée rapidement », s’est exclamé Alain Croteau.
Le coordonnateur régional des Métallos pour la Côte-Nord, Nicolas Lapierre abonde dans le même sens et déplore que l’AMQ boude ces outils essentiels à la santé et sécurité des travailleurs à cause d’un dossier en litige devant le tribunal administratif du travail mettant ainsi les bâtons dans les roues à de nouvelles mesures de prévention destinées à favoriser une réglementation efficace s’adaptant aux réalités du monde minier qui pourrait éviter de graves accidents et sauver des vies. « On ne veut pas revenir au Far West. Nous avons sommé le gouvernement du Québec et la CNESST à forcer l’AMQ à revenir participer aux travaux des sous-comités. »
Sur la défensive
L’AMQ déplore quant à elle la sortie publique des Métallos qui laisse planer le doute sur le sujet. Selon la présidente-directrice générale de l’AMQ, Josée Méthot : « Jamais, au grand jamais, les entreprises minières ne mettront en danger leurs travailleurs. Leur santé et leur sécurité passent avant tout, ça doit être clair. » Cette dernière précise que grâce aux efforts déployés chaque jour en prévention, le bilan en santé et sécurité du travail (SST) s’améliore continuellement. « La SST est l’affaire de tous dans les mines, peu importe le niveau hiérarchique. Le dévouement de tous les travailleurs et des gestionnaires a permis de diminuer de 22 % la fréquence des accidents dans les mines souterraines au cours des six premiers mois de 2017, comparativement à la même période en 2016. » Mme Méthot poursuit en expliquant que les accidents diminuent parce que la vigilance est à son maximum et que rien n’est plus prioritaire que d’offrir un milieu de travail sécuritaire. « C’est faux de dire le contraire », soutient-elle. « Pour l’AMQ, il est clair que l’industrie minière, comme tous les secteurs d’activité, n’est pas à l’abri [d’incidents malheureux] » SIC. « Oui, des accidents surviennent sur les sites miniers malgré toutes les actions que l’industrie met en place. Ce qu’il faut faire et ce qu’on fait d’ailleurs, c’est de s’assurer de [limiter les risques au minimum] SIC et de travailler en collaboration pour conserver le bilan fort enviable de l’industrie minière en matière de SST », a conclu Mme Méthot.