Réserve de la biodiversité
Lâavenir Ă©cologique des monts Groulx-Uapishka menacĂ©
par Ăric Cyr
Une portion des monts Groulx-Uapishka, situés le long de la route nationale 389, fait partie de la réserve de la biodiversité et constitue une aire protégée. Ce récif montagneux est malheureusement écorché par des motoneigistes insouciants et irrespectueux qui font fit la rÚglementation en vigueur leur interdisant de se balader sans guide dans ce secteur préservé qui couvre le tiers ouest de la superficie du massif.
Il faut dire que le rĂšglement nâa aucun mordant puisque le ministĂšre du DĂ©veloppement durable, de lâEnvironnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC) censĂ© appliquer la loi ne patrouille que trĂšs rarement sur les lieux. Lâun des fondateurs des Amis des monts Groulx et des sentiers des monts Groulx-Uapishka qui cĂ©lĂ©brait son 30e anniversaire cette annĂ©e, Michel Denis, un aventurier de 72 ans qui habite la rĂ©gion, sâindigne de cette nĂ©gligence et fait appel au civisme des motoneigistes et Ă la collaboration des clubs de motoneige afin de tenter de sensibiliser leurs membres Ă lâimportance de respecter lâĂ©tat naturel de ce joyau.
Les invasions barbares
« La rĂ©alitĂ© que nous vivons actuellement est sombre et concerne lâavenir Ă©cologique de ce massif unique. Ce territoire qui a Ă©tĂ© ouvert par et pour les randonneurs est maintenant envahi par la motoneige. Le mot envahi nâest pas trop fort, car dâaprĂšs une Ă©valuation, et malgrĂ© le fait que les deux tiers du massif soient pourtant accessibles aux motoneiges, au-delĂ de 1500 motoneigistes ont circulĂ© en toute libertĂ© et sans ĂȘtre importunĂ©s sur les sommets protĂ©gĂ©s des monts Groulx-Uapishka Ă lâintĂ©rieur de la RĂ©serve de biodiversitĂ© Uapishka. Cela sâest fait en dĂ©pit du rĂšglement du ministĂšre de lâEnvironnement, responsable de ce territoire, qui stipule quâil est interdit de circuler en vĂ©hicule motorisĂ© au-delĂ de 800 mĂštres dâaltitude (ce qui correspond Ă la limite des arbres). » Visiblement irritĂ© par la situation qui risque de dĂ©tĂ©riorer le patrimoine unique de la faune et de la flore et de nuire de façon irrĂ©mĂ©diable aux espĂšces animales et vĂ©gĂ©tales qui sây retrouvent, M. Denis dĂ©nonce lâinaction et lâinertie du gouvernement libĂ©ral de Philippe Couillard dans ce dossier.
« Le gouvernement du QuĂ©bec a dĂ©crĂ©tĂ© que câest une aire protĂ©gĂ©e sur papier, mais dans les faits le rĂšglement qui la protĂšge est totalement inefficace. »
Destination récréotouristique envahie
« La consĂ©quence la plus dĂ©moralisante pour nous est que les randonneurs, les skieurs et les raquetteurs commencent Ă dĂ©serter le territoire vers dâautres montagnes, comme les monts Chic-Chocs en GaspĂ©sie, Ă lâabri des bruits de moteurs, dâodeurs dâessence et de traces de motoneiges. Ces adeptes de grands espaces et dâair pur commencent Ă bouder lâendroit puisquâils nây retrouvent plus le silence, la quiĂ©tude et la neige vierge qui faisaient la rĂ©putation de ce massif montagneux qui constituait jusquâĂ tout rĂ©cemment un endroit de prĂ©dilection et lâultime expĂ©rience de communion avec la nature dans le Nord quĂ©bĂ©cois. »
Vandales des montagnes
« Nous avons essayĂ© de sensibiliser les motoneigistes Ă lâimportance de respecter cette terre sacrĂ©e ancestrale innue et la faune et flore qui lâhabitent, mais il semble que nos efforts nâont pas obtenu les rĂ©sultats escomptĂ©s. Des affiches oĂč on pouvait lire « Motoneiges dĂ©fendues sur les sommets » ont Ă©tĂ© installĂ©es afin de bien dĂ©limiter la zone naturelle protĂ©gĂ©e, mais la plupart ont Ă©tĂ© vandalisĂ©es ou arrachĂ©es par des malfaiteurs. Un dĂ©linquant a mĂȘme coupĂ© un arbre sur lequel on avait posĂ© une pancarte. Certains motoneigistes apathiques abandonnent leurs dĂ©chets sur place. Des individus ont mĂȘme Ă©tĂ© jusquâĂ ajouter de lâeau dans les bidons dâessence des agents de la faune. »
Fourbir les armes
Les amis des monts Groulx peuvent compter sur lâappui formel dâorganisations de protection de la nature, dâassociations touristiques rĂ©gionales et dâinstitutions acadĂ©miques universitaires et collĂ©giales. Leur engagement envers cette cause stimule et donne confiance aux bĂ©nĂ©voles qui oeuvrent au sein de lâorganisme.
« Nous avons exercĂ© une influence soutenue auprĂšs du ministĂšre de lâEnvironnement afin quâune partie de ce massif devienne une rĂ©serve de biodiversitĂ© en croyant naĂŻvement et Ă tord que cela lui garantirait protection. Nous avons lâexpĂ©rience de lâaction combattive, car dans le passĂ©, nous avons menĂ© avec succĂšs des luttes contre les industries miniĂšres et forestiĂšres qui souhaitaient envahir le territoire des monts Groulx-Uapishka. Nous souhaitons une cohabitation harmonieuse, mais sâil le faut nous mĂšnerons cette lutte contre les motoneigistes rĂ©calcitrants et nous utiliserons si nĂ©cessaire les tribunes internationales. Ce ne sera quâune bataille de plus que nous mĂšnerons Ă bien. Nous ne lĂącherons pas le morceau » assure M. Denis.
« Ce nâest pas comme si lâespace pour pratiquer la motoneige manquait dans la rĂ©gion. Nous demandons juste que les adeptes de ce sport motorisĂ© respectent cet espace protĂ©gĂ© afin de le prĂ©server pour les gĂ©nĂ©rations futures. Chacun Ă sa place, une place pour chacun. Lâharmonie est dans la nature. Quand les activitĂ©s motorisĂ©es et non motorisĂ©es se dĂ©rouleront sur des territoires diffĂ©rents, lâharmonie rĂšgnera sur les monts Groulx-Uapishka. » Un citoyen fermontois, Denis Moreau travaille actuellement sur la concrĂ©tisation dâun sentier de motoneige alternatif entretenu par une surfaceuse pour contourner les espaces protĂ©gĂ©s et accĂ©der aux deux tiers Est hors rĂ©serve qui comprendrait un refuge.