Écrasement d’avion au Labrador
Poursuite intentée contre Air Saguenay
par Éric Cyr
La compagnie québécoise Air Saguenay devra faire face à des accusations devant la justice à la suite de l’écrasement d’un hydravion de Havilland DHC-2 au lac Mistastin au Labrador, le 15 juillet dernier. La famille d’une des victimes, le guide de pêche Clifford Randell père de quatre enfants, a déposé une poursuite à la Cour suprême de Terre-Neuve-et-Labrador même si la carlingue n’a toujours pas été récupérée et que les débris de l’épave gisent au fond de l’eau.
La tragédie aérienne survenue dans le cadre d’une expédition de pêche, en partance du camp Three Rivers Lodge situé non loin de Schefferville, a causé la mort des sept occupants de l’aéroplane Beaver, dont quatre Américains et le pilote Gilles Morin. Même si la cause de l’accident fatal n’a pas encore été déterminée avec précision, l’avocat de la famille, Jamie MacGillivray, entend démontrer que le crash aurait pu être causé par une erreur de pilotage. La poursuite soutient que l’entreprise n’a pas su s’adapter aux normes de sécurité puisqu’aucune des personnes décédées sorties de l’eau ne portait de vêtement de flottaison individuel (VFI). La partie plaignante remet également en doute la compétence du pilote et laisse entendre qu’un mauvais entretien de l’appareil pourrait aussi avoir contribué à la catastrophe. Le rapport du BST, qui n’a pas encore été en mesure de déterminer la cause de l’écrasement dans l’eau, précise que le pilote était qualifié pour le vol en vertu de la règlementation en vigueur, qu’il comptait plus de 16 000 heures d’expérience sur ce type d’appareil et qu’aucune anomalie n’a été relevée dans les registres d’entretien.
Nouvelle réglementation
L’obligation pour les exploitants d’hydravions de faire en sorte que les membres d’équipage et les passagers portent un VFI lorsque l’hydravion est utilisé sur un plan d’eau ou au-dessus de celui-ci n’entrera en vigueur qu’en septembre 2020 à la suite d’une modification au Règlement de l’aviation canadien (RAC). La recommandation de mars 2011 sur la sécurité du transport aérien A11-06 du Bureau de la sécurité des transports (BST); rendra obligatoire le port d’une veste de flottaison approuvée pour l’aviation pour les occupants d’un hydravion survolant des étendues d’eau. Le ministère des Transports du Canada exigera dorénavant que les occupants d’hydravions commerciaux soient tenus de porter un dispositif individuel qui assure leur flottaison après une évacuation d’urgence. Après un long processus d’évaluation par Transports Canada et le BST, des modifications ont été apportées en mars 2019. Selon ces conclusions, dans bien des accidents, lorsqu’un occupant réussit à sortir d’un aéronef en train de couler, il ne porte pas de gilet de sauvetage, ce qui peut aboutir à une noyade. Il a été démontré que les personnes qui se retrouvent dans une telle situation cherchent avant tout à s’extirper de l’appareil et souvent, dans leur hâte, elles ne mettent pas de VFI, soit par manque de temps, soit parce qu’elles n’y ont pas pensé.
Recherche et sauvetage
Malgré des recherches intensives menées durant plusieurs semaines par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et la Marine royale canadienne, l’élément maritime des Forces armées canadiennes, les débris de la carcasse de l’avion et le corps de trois des sept victimes, dont la dépouille du pilote, n’ont toujours pas été recouvrés. L’éloignement et les mauvaises conditions météorologiques subséquentes auraient aussi posé des problèmes logistiques et retardé l’arrivée des premiers intervenants. Ces facteurs, combinés à l’absence de témoin, auraient empêché le BST de mener une enquête exhaustive. Selon la GRC, la profondeur du lac et son isolement ont posé des défis importants pour les plongeurs. Le président d’Air Saguenay, Jean Tremblay, soulève des questions sur le dispositif des recherches.