Taux de trihalométhanes
Fermont au-dessus de la norme maximale permise
par Ăric Cyr
Lâeau potable dâune dizaine de municipalitĂ©s de lâEst-du-QuĂ©bec est contaminĂ©e aux trihalomĂ©thanes (THM) selon les plus rĂ©centes donnĂ©es du ministĂšre du DĂ©veloppement durable, de lâEnvironnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC) et Fermont en fait partie. Lâeau du robinet contient un taux de THM, des composĂ©s organiques volatils produits lors de la chloration des eaux, au-dessus de la norme maximum permise par QuĂ©bec selon le dernier bilan annuel de la qualitĂ© de lâeau potable publiĂ© le 22 fĂ©vrier dernier et signĂ© par le technicien des eaux de la Ville de Fermont, Normand Bergeron.
Que sont les trihalométhanes?
Les THM sont un groupe de sous-produits chlorĂ©s rĂ©sultant de la rĂ©action du chlore utilisĂ© comme dĂ©sinfectant avec des matiĂšres organiques naturellement prĂ©sentes dans lâeau. Toutes les sources dâeau potable sont susceptibles de contenir des micro-organismes comme des bactĂ©ries, des virus et des protozoaires, qui peuvent causer des maladies graves. Lâeau potable est dĂ©sinfectĂ©e pour dĂ©truire ou inactiver ces micro-organismes potentiellement nĂ©fastes. En raison de son efficacitĂ©, le chlore est le dĂ©sinfectant le plus souvent ajoutĂ© Ă lâeau potable Ă travers le monde. Les THM proviennent de la rĂ©action du chlore sur la matiĂšre organique (plantes en dĂ©composition, algues) et câest dâailleurs ainsi que le chlore tue les micro-organismes, mais il pourrait, selon un courant de pensĂ©e, aussi avoir un effet sur certaines de nos cellules et lâinfluence du comportement de ces molĂ©cules sur notre organisme nâest pas trĂšs bien connu. Le chlore permet cependant de dĂ©truire la plupart des micro-organismes susceptibles de causer des maladies parfois mortelles. On peut ĂȘtre exposĂ© aux THM en buvant de lâeau ou par contact de lâeau avec la peau dans la salle de bains, mais surtout Ă la piscine oĂč le contact est prolongĂ©. La population est principalement exposĂ©e aux THM par ingestion dâeau potable. Ces composĂ©s peuvent Ă©galement ĂȘtre absorbĂ©s par la peau lors dâun contact cutanĂ© avec lâeau ou encore ĂȘtre inhalĂ©s une fois quâils se sont volatilisĂ©s de lâeau. Outre lâingestion dâeau potable, la douche, la lessive, le lave-vaisselle, les piscines et les cuves thermales figurent parmi les sources dâexposition aux THM. Ces substances sont aussi dĂ©tectĂ©es dans les aliments et dans une moindre mesure dans lâair extĂ©rieur et dans certains produits de consommation.
Le chlore, un risque calculé
La prĂ©sence du chlore dans les rĂ©seaux de distribution est une garantie de moindre pollution biochimique (bactĂ©ries, virus). Il est employĂ© depuis plus dâun siĂšcle et a certainement sauvĂ© de nombreuses vies dans les pays industrialisĂ©s. Son absence dans certaines rĂ©gions du globe fait encore de nombreuses victimes. Il existe cependant des collectivitĂ©s qui nâutilisent pas de chlore pour traiter lâeau du robinet, mais un traitement Ă lâozone par exemple. La facilitĂ©, le moindre coĂ»t et une relative sĂ©curitĂ© font que lâabsence de chlore fait exception. Supprimer ce traitement serait comparable Ă supprimer la vaccination ou les antibiotiques, mais le surdosage ou lâutilisation abusive peut gĂ©nĂ©rer des problĂšmes Ă la santĂ© de certains individus dont lâorganisme tolĂšre mal les substances provenant de la chloration de lâeau.
La chloration de lâeau potable
Lâeau puisĂ©e dans les lacs, les riviĂšres, les nappes phrĂ©atiques et le fleuve contient naturellement des substances organiques provenant des vĂ©gĂ©taux et des ĂȘtres vivants (visibles ou microscopiques). Lâeau est le liquide commun du vivant et nâest jamais pure. Elle doit donc ĂȘtre dĂ©barrassĂ©e de ces substances potentiellement pathogĂšnes, câest pourquoi on ajoute du chlore pour la purifier, la rendre potable. Avec le chlore, elles forment des composĂ©s chimiques appelĂ©s trihalomĂ©thanes (THM), qui sont des sous-produits gazeux de la chloration, formĂ©s lorsquâon ajoute du chlore Ă de lâeau qui contient de la matiĂšre organique naturelle. Le chloroforme est le principal THM retrouvĂ© dans lâeau potable.
Effets sur la santé
Les THM pourraient selon SantĂ© et Services sociaux QuĂ©bec augmenter lĂ©gĂšrement les risques de cancer de la vessie, mais le risque nâapparaĂźtrait quâaprĂšs une pĂ©riode dâexposition prolongĂ©e. Des Ă©tudes ont aussi soulevĂ© la possibilitĂ© que le THM puisse affecter la grossesse en augmentant le nombre de fausses couches et en causant la naissance de bĂ©bĂ©s de petits poids. La Ville de Fermont a distribuĂ© un dĂ©pliant du gouvernement du QuĂ©bec dans les cases postales des citoyens fermontois en juin 2013 afin de les informer de la prĂ©sence de THM dans lâeau potable de la municipalitĂ©.
Pour mieux comprendre
Selon le technicien des eaux Ă la Ville de Fermont, Normand Bergeron, « Contrairement Ă la rumeur, lâeau potable de Fermont nâest pas ferreuse, elle est colorĂ©e naturellement parce quâelle nâa subi aucun traitement de filtration. Lâeau est pompĂ©e du lac Perchard vers le rĂ©servoir avec une dose de chlore gazeux pour tuer les virus et les bactĂ©ries. Malheureusement, sans filtration, lâeau consomme 80 % du chlore quâon injecte juste pour oxyder la matiĂšre organique avant mĂȘme dâavoir le temps de tuer un seul microbe. Ces virus, kystes, giardias, entĂ©rocoques, Escherichia coli et oocytes de Cryptosporidium prennent un certain temps Ă Ă©liminer. Le temps de contact entre les microbes dans lâeau et le taux de chlore est calculĂ© et vĂ©rifiĂ© rĂ©guliĂšrement par le MDDELCC. » Une Ă©tude rĂ©cente a justifiĂ© une augmentation du taux de chlore par rapport au passĂ© afin de maintenir 0,1 milligramme de chlore actif par litre dâeau (mg/l) en fin de rĂ©seau. Par comparaison, la piscine publique de Fermont dĂ©sinfecte son eau en maintenant un taux de chlore Ă 1,2 mg/l. Son systĂšme de filtration membranaire Ă©vite la formation de THM et dâacides acĂ©tiques halogĂ©nĂ©s (AHA), tandis que son rĂ©acteur Ă bombardement UV Ă©limine les chloramines, responsables de lâodeur piquante du chlore.
« Je fais analyser lâeau du rĂ©seau de Fermont chaque semaine par un laboratoire accrĂ©ditĂ© par le MDDELCC qui confirme lâabsence de bactĂ©ries E.coli. »
Mine des Chinois
M. Bergeron confie que : « lâeau de la mine des Chinois peut paraĂźtre plus attrayante par sa limpiditĂ©, mais personne ne certifie quâelle ne contient aucune bactĂ©rie. Personnellement, je prĂ©fĂšre garder une cruche remplie dâeau du robinet dans le rĂ©frigĂ©rateur en laissant le chlore sâĂ©vaporer plutĂŽt que dâaller remplir des bouteilles dâeau dans le bois exactement oĂč les animaux font leurs besoins. »
Nouvelles normes
Les autoritĂ©s tiennent Ă rassurer les Fermontois en mentionnant quâafin de corriger la situation, une nouvelle usine de production dâeau potable avec technologie membranaire est actuellement en appel dâoffres et que les travaux devraient dĂ©buter Ă lâĂ©tĂ© 2017. Cette nouvelle installation permettra Ă la Ville de fournir aux citoyens, une qualitĂ© dâeau conforme aux normes et Ă la rĂšglementation Ă©tablies par le gouvernement du QuĂ©bec. Les nouvelles normes de conception des usines de production dâeau potable exigent maintenant deux barriĂšres de dĂ©sinfection pour assurer la qualitĂ© de lâeau potable. Le chlore, lâozone, les lampes UV, lâosmose et lâultrafiltration sont gĂ©nĂ©ralement les barriĂšres utilisĂ©es. La mise aux normes de lâusine de production dâeau potable de la ville de Fermont a rĂ©cemment Ă©tĂ© approuvĂ©e afin de sây conformer. En partenariat avec le MDDELCC, la Ville a dĂ©posĂ© un appel dâoffres pour la construction dâune nouvelle usine de production dâeau potable qui inclura : un traitement par coagulation au sulfate dâaluminium pour agglomĂ©rer les particules colloĂŻdales, suivi dâune ultrafiltration membranaire agissant comme barriĂšre microbiologique, un rayonnement aux lampes UV qui dĂ©sactive le systĂšme reproducteur des micro-organismes et une lĂ©gĂšre chloration pour assurer une protection efficace dans tout le rĂ©seau de distribution. Selon les reprĂ©sentants de la Ville :
« La nouvelle usine de filtration des eaux rĂšglera la problĂ©matique du haut taux de THM dans lâeau et amĂ©liorera sa qualitĂ© et sa couleur. Sans cette usine, la Ville ne pouvait pas obtenir de tels rĂ©sultats. »
Liens utiles
Institut national de santé publique du Québec.
www.inspq.qc.ca/pdf/publications/198-CartableEau/Trihalomethanes.pdf
SantĂ© Canada. Votre santĂ© et vous. Chloration de lâeau potable :
www.hc-sc.gc.ca/iyh-vsv/environ/chlor_f.html