Philippe Couillard et Lakshmi Mittal
Les hautes sphères s’entendent en altitude
par Éric Cyr
Au terme de la mission du premier ministre du Québec, Philippe Couillard, au Forum économique mondial de Davos en Suisse (la ville la plus élevée d’Europe) en janvier dernier, un accord a été conclu avec le géant sidérurgique ArcelorMittal. En échange d’importants rabais sur l’hydroélectricité consentis par la société d’État Hydro-Québec, la multinationale investira un demi-milliard de dollars au cours des quatre prochaines années dans ses installations de la Côte-Nord, ce qui se traduira par l’embauche d’une cinquantaine de personnes.
Plus qu’un chant tyrolien
En échange de ces investissements de 500 millions de dollars, ArcelorMittal verra sa facture d’hydroélectricité décroître en vertu de l’application d’un tarif préférentiel, une diminution de 60 millions sur quatre ans, octroyé par le gouvernement du Québec. La minière est dorénavant admissible à un rabais des grandes industries du « tarif L » destiné aux entreprises énergivores pour la réalisation de nouveaux projets tel qu’annoncé dans le dernier budget provincial. Par la suite, la firme pourrait recevoir un rabais supplémentaire pouvant atteindre 120 millions sur quatre autres années si elle procède à un financement additionnel. Cette économie servira à consolider les infrastructures d’ArcelorMittal au Québec et à maintenir quelque 2000 emplois sur la Côte-Nord, notamment au Mont-Wright et à Fire Lake, dans le secteur de Fermont, et à Port-Cartier. Selon un porte-parole de la compagnie, Paul Wilson, « Sans le rabais sur l’électricité, il aurait été difficile d’envisager un tel investissement. » Il précise que ces démarches s’inscrivent dans le cadre du « programme de rabais tarifaire destiné aux entreprises qui s’engagent dans la gestion de projets d’investissement. »
La ministre québécoise de l’Économie, Dominique Anglade, souligne que : « Ce rabais d’électricité vise à procurer aux grandes entreprises comme ArcelorMittal une marge de manœuvre qui leur permet d’innover et de se doter des meilleures technologies disponibles afin d’améliorer leur productivité. »
Fire Lake : le phénix
M. Wilson explique que le montant alloué par la multinationale est : « relié à l’amélioration des processus et à l’accroissement de la productivité de la mine de Fire Lake.» L’entreprise qui souhaite doubler sa production de concentré prévoit « passer de 7,5 millions de tonnes à 14 ou 15 millions de tonnes annuellement et…embaucher une cinquantaine d’employés en 2017 pour ses installations de Fire Lake. » M. Wilson a précisé que le rabais d’électricité accordé va aider ArcelorMittal à poursuivre ses activités « le plus longtemps possible » et que l’augmentation de production anticipée ne modifiera cependant pas la quantité de tonnage de la mine. Ces améliorations permettraient de prolonger au-delà de 2030 l’exploitation de la principale mine du Mont-Wright.
« C’est de l’argent qui est le bienvenu. Notre objectif est toujours de se rendre à la durée de vie du Mont-Wright, qui est de 2045, et c’est ce qu’on veut faire. »
Le premier ministre québécois, Philippe Couillard, estime qu’ArcelorMittal représente « un important pilier de la croissance économique » et que selon lui, l’investissement stimulera l’industrie minière en plus d’assurer la pérennité des emplois actuels. Le coordonnateur régional du syndicat des Métallos pour l’est du Québec, Nicolas Lapierre, salue pour sa part ces investissements qui viendront garantir la stabilité des emplois tant à Fermont qu’à Port-Cartier.
« Le gouvernement a exigé des garanties en retour des avantages consentis et a demandé à l’employeur des engagements concrets. Il est rafraichissant de constater que le joyau qu’est Hydro-Québec est utilisé comme levier économique servant à développer les régions. Nous sommes très heureux de cette annonce. Il est plus motivant de négocier dans un contexte de croissance plutôt que de décroissance de l’entreprise. »