Presse écrite à l’agonie
Crise des médias au pays
par Éric Cyr
À l’heure où la plupart des journaux souffrent énormément de la baisse des ventes publicitaires au profit des géants du Web comme Google et Facebook, la députée de Manicouagan, Marilène Gill, du Bloc québécois (BQ) considère qu’Ottawa compte parmi les fossoyeurs de la presse écrite et a fait une sortie à ce sujet, le 14 novembre dernier.
« La presse écrite est en crise partout au Québec et que font les partis fédéraux ? Les conservateurs partent en guerre contre les médias et les libéraux les laissent mourir. On a besoin d’une presse libre et forte au Québec pour une démocratie saine. Il faut que le gouvernement fédéral se sorte immédiatement la tête du sable », a déclaré la députée bloquiste de Manicouagan qui a accusé Ottawa de contribuer au déclin de la presse écrite.
Alors que le quotidien La Presse avait déjà aboli 158 postes en septembre 2015 incluant 43 à la rédaction, il annonçait récemment la suppression de 37 postes additionnels, dont 19 dans sa salle de rédaction. Le Bloc québécois réclame un crédit d’impôt remboursable sur les dépenses salariales des médias écrits. Marilène Gill s’attend également à ce que le gouvernement fédéral fournisse une aide financière immédiate aux journaux régionaux de la Côte-Nord.
David contre Goliath
Le Bloc demande aussi au gouvernement Trudeau une vaste refonte des lois encadrant le commerce électronique afin de soumettre les géants du Web, comme Facebook et Amazon, aux lois québécoises et canadiennes. Actuellement, ces multinationales profitent, entre autres, d’un avantage injuste face aux médias traditionnels dans la vente d’espaces publicitaires parce qu’elles ne sont pas soumises à la Loi sur l’impôt.
« Non seulement le gouvernement Trudeau est à la traîne, il fait même partie du problème. Il a triplé ses achats de publicité sur Facebook en sachant très bien que Facebook ne paie pas d’impôt chez nous. Ça prend un vrai changement de culture à Ottawa parce qu’actuellement, le gouvernement fédéral fait partie des fossoyeurs de la presse écrite », a conclu la députée.
La Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) a aussi fait connaître ses inquiétudes pour l’avenir de l’information en soulignant le contexte de précarité occasionnant des fermetures récurrentes d’entreprises de presse un peu partout au pays. La FPJQ juge que c’est un autre signe de la maladie qui ronge la presse écrite. Selon le président de l’organisme, Stéphane Giroux : « Seule une intervention des gouvernements permettra de sauver nos médias d’information. »
Soupir de soulagement
Le gouvernement Trudeau a finalement annoncé, le 21 novembre dernier, des mesures d’aide aux médias d’information totalisant 595 M $ sur cinq ans pour l’ensemble du pays et qui prendra la forme de deux crédits d’impôt. Le premier ministre Justin Trudeau confie qu’il est préoccupé par la situation. Il a admis la nécessité d’une information fiable et de qualité et que le gouvernement a la responsabilité d’aider et de faciliter la transition vers la numérisation : « On ne peut pas avoir une démocratie en santé si les citoyens ne sont pas bien informés. » La FPJQ croit que ces nouvelles mesures devraient aider les salles de rédaction à passer au travers de cette crise qui menaçait à moyen terme la survie du journalisme, un des piliers de la démocratie, et souligne qu’il était temps que les responsables fédéraux s’attaquent au problème afin de résorber la situation. Tous les partis d’opposition se réjouissent de cette décision sauf les conservateurs qui accusent les libéraux de tenter d’acheter les journalistes avant les prochaines élections.