Contrat d’hydroélectricité
Le dossier de Churchill Falls à nouveau devant la Cour suprême
par Éric Cyr
La société d’État Nalcor Energy de Terre-Neuve-et-Labrador a l’intention de demander à la Cour suprême du Canada d’inciter son vis-à-vis la société d’État Hydro-Québec à renégocier l’entente sur le prix de l’électricité pour la centrale de Churchill Falls située au Labrador. Le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador avait déjà été débouté par la plus haute instance fédérale en 1984 et en 1988 et plus tard par la Cour supérieure du Québec qui avait aussi rejeté une tentative visant à faire modifier cet accord en 2014 et en août dernier. Conclu en 1969, cet engagement a été automatiquement renouvelé le premier septembre pour 25 ans soit jusqu’à la date d’échéance en 2041.
Le statu quo
Le contrat est l’objet de frictions entre les deux provinces depuis des décennies. Après avoir déjà contesté cette transaction jusqu’en Cour suprême du Canada et essuyé deux refus, le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador s’était tourné vers la Cour supérieure du Québec en 2010 plaidant la notion de « bonne foi » du Code civil du Québec après qu’Hydro-Québec eut refusé de renégocier les tarifs entourant l’achat d’électricité de Churchill Falls. La Cour d’appel du Québec s’est aussi rangée derrière le verdict rendu en 2014 par le tribunal de première instance et a estimé en août dernier qu’Hydro-Québec n’avait aucune obligation de rouvrir l’entente conclue en 1969 concernant l’énergie produite à Churchill Falls. L’entente prévoit que la société d’État québécoise peut acheter l’électricité de Churchill Falls à bas prix avant de la revendre à un tarif plus élevé sur son marché intérieur (voire aux Québécois) ainsi qu’à l’exportation, ce que déplore Terre-Neuve-et-Labrador.
La grosse part du gâteau
Depuis la signature de l’entente, le 12 mai 1969, les profits encaissés par l’État québécois ont été largement supérieurs à ceux réalisés par Terre-Neuve-et-Labrador. En 2010, la province de l’Atlantique estimait que cet accord lui avait permis d’empocher seulement un milliard de dollars comparativement à 22 milliards de dollars pour le Québec et évalue qu’à la suite du renouvellement du contrat, Hydro-Québec devrait empocher 1,7 milliard de dollars par année pour l’électricité en provenance du réservoir Smallwood qui alimente Churchill Falls comparativement à
60 millions de dollars annuellement pour Terre-Neuve-et-Labrador. La société d’État québécoise a toujours prétendu en cour, avec, succès, qu’à la signature du contrat il y a 47 ans, c’est elle qui a tout payé et qui a pris tous les risques.
La centrale hydroélectrique souterraine de Churchill Falls est aménagée sur le cours supérieur du fleuve Churchill, au Labrador. Avec une puissance installée de 5 428,5 mégawatts (MW)*, elle constitue la deuxième plus grande centrale souterraine au monde derrière la centrale Robert-Bourassa à la baie James dans le nord du Québec.
*1 MW = 1000 kilowatts (KW)