Pandémie
La nouvelle calamité
par Éric Cyr
Comme tout droit sorti d’un mauvais film de série B s’installe ce que l’on a d’abord qualifié d’épidémie. Une nouvelle souche du coronavirus, la Covid-19, gagne le monde qui nage en plein inconnu. Les premiers cas apparaissent au loin en République populaire de Chine puis en Europe, en Amérique et sur tous les continents. C’est l’incertitude et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) tarde à réagir. Les experts du domaine scientifique émettent finalement des avis au sujet de ce virus ravageur qui se propage à tout vent.
Après un décalage, la réalité fait surface et la vie est bouleversée. Il y a les anxieux, les critiques, les incrédules, les insouciants, les méfiants, les stupéfaits. Chacun tente d’expliquer le contexte ayant mené à ce fléau planétaire qui change de façon draconienne les habitudes et les mœurs. Un peu partout, des gens meurent comme des mouches. Dans l’empire du Milieu, Wuhan, une mégalopole polluée, fait la manchette autour du globe. En Italie, la « sérénissime » Venise est désertée et les gondoles se font discrètes dans la cité des Doges. Personne ne rêve plus de bâtir des châteaux en Espagne. Certains voient un parallèle avec la terrible grippe espagnole qui a sévi lors de la Première Guerre mondiale et qui a décimé dix fois plus de gens que la Grande Guerre elle-même. Pourtant cette maladie contagieuse du début du XXe siècle ne tire pas son origine en terre hispanique, mais bien du Kansas aux États-Unis. La France, berceau de la démocratie moderne, n’y échappe pas et, après l’Hexagone, l’affliction se propage progressivement à l’ensemble de l’Union européenne en Russie et jusqu’au pays de l’oncle Sam où en seulement un mois sans se « tromper », elle tue plus d’Américains que la guerre du Vietnam.
Ça va bien aller, mais des frontières ferment, des populations sont cloisonnées, confinées. Les médias ne parlent que de la nouvelle pandémie. La course au vaccin a commencé. Les savants cherchent un remède. De brillants scientifiques sont mis à contribution. Les rassemblements sont interdits : quarantaine et distanciation sociale sont des mots à la mode. Des photos circulent. Recherché virus. Créée en laboratoire ou issu de l’évolution naturelle ? Les complotistes s’opposent aux adeptes de Darwin. Pendant ce temps, des cadavres s’empilent. L’infection galopante se propage à la vitesse grand V bousculant l’ordre établi. Les normes sont ébranlées et des pays se disputent du matériel médical tant convoité. Les voisins deviennent des suspects, des politiciens improvisent des discours à la télévision, à la radio et dans les journaux et qui sont relayés sur Internet. Des mesures drastiques sont instaurées. C’est la guerre au virus et gare aux dommages collatéraux.
Des voix s’élèvent pour parler d’une éventuelle mutation virale et d’une deuxième vague encore plus mortelle. Tout bascule, les conventions se bousculent. Personne n’est invincible, nul n’est à l’abri. Pourtant, les dirigeants parlent dorénavant de déconfinement. L’économie s’oppose à la pandémie.
Le monde a changé. Des précautions d’usage sont en vigueur : poignées de main et accolades sont proscrites. Partout, des armées de masques font surface. Héros et Zoro se battent pour tenter d’enrayer la progression de l’ennemi invisible.
Des anges gardiens deviennent les meilleurs sous la terreur. Les combattants s’alignent au front et malgré la frayeur attendent le prochain chapitre qui viendra assurément, inévitablement. Seront-ils vainqueurs, serons-nous épargnés du danger ? Les philosophes auront beau discourir vitam aeternam sur les expressions du latin médiéval en opposition classique « natura naturans », la nature naturante, ou « natura naturata », la nature naturée, le phénomène est bien concret et les nombreuses dépouilles en témoignent.
Le virus se serait-il calmé où ne serait qu’une accalmie avant la tempête ? Qui vivra verra. Après avoir tué sans vergogne durant quelques années, la grippe espagnole s’est finalement dissipée. Qu’adviendra-t-il de la Covid-19 ? Bientôt un mauvais souvenir ? En attendant à vos masques, prêts, portez ! C’est la ruée vers les cagoules en tout genre. Tous veulent s’en procurer : industriels, artisanaux ou composés de plusieurs matériaux. Oui, le monde a bien changé. Pénurie de certaines denrées, c’est la panique sur les marchés. Les investisseurs se souviennent du krach boursier de 1929. Vaccin ou pas ? L’avenir le dira. En attendant de pouvoir dire : gàobié, gaddio, adios, adieu, farewell ou sayonara à cette peste moderne, protégez-vous bien et restez en sécurité.