Renouvellement de la convention collective d’ArcelorMittal
Rejet en bloc des offres avant de conclure une entente de principe
par Éric Cyr
Au moment de mettre sous presse, c’est avec une très forte majorité de 99,6 % que les 2 000 travailleurs syndiqués d’ArcelorMittal sur la Côte-Nord à Fermont, Fire Lake et Port-Cartier avaient rejeté l’offre finale de leur employeur, décidant du même coup de déclencher une grève en l’absence de règlement. Le ton a monté d’un cran à la suite de la proposition de la multinationale d’instaurer un régime de retraite à deux vitesses, désavantageux pour les nouveaux travailleurs, qui a été vivement décrié par les membres. La compagnie a par la suite rapidement rappelé le syndicat à la table de négociations après avoir fait appel en renfort à l’ancien premier ministre du Québec, Lucien Bouchard, en tant que négociateur pour la partie patronale.
Sauver l’héritage
« Le mandat est clair : il n’est pas question de lâcher les jeunes. Le régime de retraite doit être maintenu pour tous. Si l’employeur s’entête, le minerai restera là où il est, aussi longtemps qu’il le faudra pour assurer des conditions de travail équitables pour tous les travailleurs, actuels et futurs. Les anciens se sont battus pour ce régime de retraite, les membres actuels sont déterminés à le transmettre aux plus jeunes », fait valoir le coordonnateur des Métallos pour la Côte-Nord, Nicolas Lapierre.
Règlement ou conflit de travail
Outre le régime de retraite, les syndiqués demandent de rapatrier au sein d’ArcelorMittal des postes attribués à des sous-traitants. Le syndicat souhaite entre autres s’attaquer aux différences entre les conditions des travailleurs du site minier de Fire Lake et de ceux de la mine du Mont-Wright. « Il est minuit moins une. Le nœud est simple à défaire, du moment que la volonté y est de la part de l’employeur qui ne doit pas douter de la détermination des 2 000 membres! S’il faut passer par un conflit, les membres n’hésiteront pas », confie le syndicaliste.
Aux grands maux les grands remèdes
L’adjoint au directeur québécois des Métallos, Dominic Lemieux, était de passage à Fermont afin de rencontrer les associations syndicales sur place et discuter avec les membres sur le terrain. Le syndicat a fait appel à ce négociateur expérimenté afin de tenter de dénouer l’impasse après que la multinationale a transmis ses offres finales, mais non globales, au grand mécontentement des travailleurs. « Quand il y a des dossiers chauds, c’est là que j’embarque. J’ai participé aux négociations de Rio Tinto Alcan et à celles de Lafarge à Saint-Constant », confie le colosse imposant avant d’être interrompu par un appel téléphonique concernant la mine Raglan dans le nord du Québec.
Le respect, la pierre angulaire
Le principal élément qui contribue à accentuer les tensions entre ArcelorMittal et les travailleurs selon M. Lemieux est le manque de respect de la compagnie à l’égard de ses employés qui sont considérés selon ce dernier comme de simples pions et ne sont pas consultés dans des décisions qui les concernent et qui sont prises à leurs dépens. « Les travailleurs veulent regagner le respect de l’employeur. Ils ne se sentent plus respectés. » Il y a aussi beaucoup de contrats accordés en sous-traitance et ça ne passe pas.
« Durant le blitz de négos, le conciliateur a recommandé la présence d’un décideur du côté patronal, le vice-président des ressources humaines a alors été appelé. Du côté syndical, c’est moi qui occupe ce poste. »
Selon le pilier syndical, une retraite fermée à Québec regroupant les différents intervenants a permis de faire certaines avancées au niveau du normatif (tous les volets non pécuniaires) notamment pour les vacances, mais les discussions ont accroché sur l’aspect financier. « Il y a encore des enjeux majeurs en suspens dont un écart important de 8 $ l’heure entre les travailleurs de la mine de Fire Lake et celle du Mont-Wright, les horaires de travail, le rattrapage, la prime du fer à laquelle certains travailleurs n’ont toujours pas droit et le fonds de pension. D’autres clauses notamment l’augmentation salariale et les assurances collectives ne sont pas encore réglées », expliquait ce dernier avant l’annonce de la minière de confier le rôle de négociateur à Lucien Bouchard, qui avait déjà occupé ce poste en 2005 à l’époque de la minière Québec Cartier.
Le gros canon
Le président et chef de la direction d’ArcelorMittal Exploitation Minière Canada, Pierre Lapointe, a commenté l’arrivée de l’ancien politicien dans l’arène : « Cette décision a été prise avec la ferme intention de se donner les moyens nécessaires pour conclure une entente satisfaisante pour les deux parties. » Une entente de principe a finalement été conclue à Montréal entre le syndicat des Métallos et le géant de l’acier. Les syndiqués devaient se prononcer sur le contenu de l’entente avant de choisir de l’entériner ou non, le 11 mai dernier.