Les fly-in/fly-out
Étude sur les impacts
par Geneviève Beauchemin
Il y a un peu plus de deux ans, j’ai eu la chance de passer deux semaines à Fermont afin d’étudier l’impact du phénomène du fly-in/fly-out (FIFO) sur la communauté. En tant qu’étudiante universitaire à la maîtrise, mon intérêt se porte vers les communautés du Nord. Par cette recherche, je tentais de mieux comprendre comment le FIFO affecte la communauté et quels en étaient les impacts sur le tissu social de cette municipalité.
Le FIFO est peu étudié au Québec et les impacts à long terme sur les communautés minières sont un angle mort important. Notre méthodologie s’appuie sur des travaux australiens où les chercheurs ont documenté une série d’impacts sociaux associés au FIFO. L’objectif de départ était donc de comparer les caractéristiques sociales recensées en Australie avec celles réellement vécues à Fermont.
Vous avez été plus de 375 personnes à compléter le questionnaire en ligne et une vingtaine de personnes à répondre à mes questions en entrevue. Cette participation démontre l’importance de ce sujet pour votre communauté et m’a permis de constater la grande générosité des gens qui m’ont parlé.
Le FIFO est un sujet très émotif à Fermont. Pour ou contre le FIFO, cette question divise la communauté et entraîne des tensions appréciables. L’enquête démontre que ce n’est pas la présence des FIFO qui désorganise actuellement la vie communautaire fermontoise, mais plutôt la perte de sens de la communauté. En fait, depuis la fin des travaux de construction et d’agrandissement (2008-2012) où la présence des travailleurs était associée à un sentiment d’envahissement et à des comportements souvent inappropriés, les résidents et les travailleurs migrants cohabitent relativement pacifiquement. Certains impacts sont encore présents malgré tout, notamment en ce qui concerne la pression sur le marché immobilier et la disponibilité des services de santé.
Cependant, l’impact le plus marqué se situe plutôt dans le changement de comportement des citoyens locaux face à l’ouverture des postes FIFO. En effet, plusieurs travailleurs résidents y voient une opportunité de quitter Fermont tout en conservant leur emploi, parfois même au prix de leur ancienneté.
Pour les Fermontois, la peur associée à la perte de la communauté côtoie le désir de quitter Fermont. Une même personne peut simultanément être fière d’être fermontoise et postuler pour un poste FIFO pour préparer sa retraite ou se rapprocher de sa famille. Pour certains, le FIFO est l’issue inespérée, pour d’autres, une chance. En fait, la vie dans le Nord exige beaucoup de ses résidents en matière de sacrifices et d’adaptations. Le Nord se conjugue parfois difficilement avec les désirs de la vie moderne.
En conclusion, mon étude aura au moins permis de voir que le FIFO représente un défi important pour le maintien d’une communauté dynamique à Fermont. L’attachement à cette communauté, confirmé par les témoignages de plusieurs résidents, permet d’espérer qu’on pourra trouver des moyens pour relever ce défi et préserver ce milieu de vie. Ce constat milite pour une réflexion commune sur le développement de votre région et pourquoi pas, sur l’occupation du territoire québécois.
NDLR * le fly-in/fly-out aussi appelé navettage aérien est un mode de transport aéroporté, généralement par vols nolisés, destiné à déplacer des travailleurs vers leur lieu de travail et par la suite une fois leurs tâches complétées à les réacheminer à leur point d’origine.