Hydroélectricité
Churchill Falls : vers l’avenir
par Éric Cyr
Terre-Neuve-et-Labrador a remporté le 20 juin dernier sa première victoire, toutefois partielle, en un demi-siècle dans le conflit qui l’opposait à Hydro-Québec au sujet de l’entente concernant la vente d’électricité de la centrale hydroélectrique de Churchill Falls au Labrador.
La longue bataille juridique dans l’interprétation et l’application du contrat du 12 mai 1969, qui s’est avérée très profitable pour le Québec et dont la validité a été confirmée par la Cour suprême du Canada en 2018, remonte à 50 ans. À l’approche de la fin du terme initial de 40 ans, la récente décision partagée de la Cour d’appel du Québec constituera vraisemblablement la dernière dans ce dossier puisque tous les recours semblent dorénavant épuisés pour cette province. La plus haute instance judiciaire québécoise a tranché et, dans ce cas particulier, donne raison à Terre-Neuve-et-Labrador qui soutient qu’Hydro-Québec ne jouit pas du droit exclusif d’acheter toute l’énergie produite par cette centrale du Labrador.
La décision stipule cependant que la société d’État québécoise jouit toujours du « droit exclusif d’acheter et de recevoir toute la puissance disponible et toute l’énergie produite à la centrale de Churchill Falls » jusqu’au 31 août 2041 sur une base mensuelle sans être restreinte à un plafond quantitatif à l’exception de celle associée à deux blocs. Terre-Neuve-et-Labrador devra donc se contenter de la mince consolation de pouvoir écouler une petite quantité de l’électricité produite à Churchill Falls pour la vente à une tierce partie en vue d’une consommation hors Québec.
« Le droit d’Hydro-Québec à l’énergie produite par la centrale est maintenant assujetti à un plafond contractuel qui n’existait pas pendant les 40 premières années de l’entente. À compter du 1er septembre 2016, la quantité d’énergie ne dépend plus que des besoins d’Hydro-Québec : elle est prédéterminée. »
Interprétation et non-renégociation
Hydro-Québec, qui a assumé tous les coûts et les risques associés au projet lors de la signature de l’accord de 1969, pourra donc continuer à acheter la majeure partie de l’électricité produite à cette installation du Labrador incluant toute la puissance additionnelle offerte puisque le jugement ne remet pas en cause le contrat initial ni le prix de vente de l’électricité déterminé il y a cinquante ans. La société d’État a tout de même applaudi cette décision dans un communiqué : « Hydro-Québec est heureuse de constater que la Cour d’appel confirme son droit à la flexibilité opérationnelle prévue au contrat de 1969 et qu’elle confirme qu’Hydro-Québec n’est pas assujettie à des blocs d’énergie mensuels. »
Le premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador, Dwight Ball, s’est dit soulagé de la décision et considère que cela aura un apport bénéfique pour sa province. Lors d’une rencontre avec son homologue à la fin de l’année dernière, le premier ministre du Québe François Legault, anticipant de nouveaux projets, disait privilégier la coopération et souhaiter que les deux provinces travaillent ensemble pour l’avenir au-delà de 2041, vision alors partagée par son vis-à-vis.