Les représentants de l’expédition des Premières Nations ont chaleureusement été accueillis par des citoyens visiblement heureux de venir à leur rencontre lors de leur passage dans la région de la MRC de Caniapiscau, du 1er au 3 mars 2023, d’abord dans les communautés innue de Matimekush-Lac John et naskapie de Kawawachikamach dans le secteur de Schefferville, puis à Fermont.
La soixantaine de participants de la délégation de motoneigistes de la grande expédition du feu sacré, composée de membres de près de la moitié des 11 nations autochtones distinctes habitant au Québec, incluant le conjoint de feue Joyce Echaquan, Carol Dubé de Manawan, neuf femmes et quatre allochtones québécois, aura parcouru, du 16 février au 4 mars, une distance de 4275 kilomètres jusqu’à sa destination finale, la communauté innue de Uashat mak Mani-utenam (Sept-Îles).
Comment résumer cette démarche sinon en la qualifiant de belle aventure vers la réconciliation entre peuples ? Comment décrire ces échanges amicaux sinon en les désignant de rapprochement enrichissant, harmonieux et respectueux entre nations ? Que retenir sinon que les premiers occupants du territoire sont là depuis des temps immémoriaux et que malgré une histoire malheureusement trop souvent tragique, leurs racines sont bien ancrées dans le sol de leurs ancêtres ? Ils sont toujours là et font partie à part entière du lieu qu’ils habitent dans leur cœur, dans leur mémoire et dans leur vie.
Les communautés de Chisasibi, Kawawachikamach, Lac-Simon, Manawan, Matimekush-Lac John, Nutashkuan, Opitciwan, Oujé-Bougoumou, Pikogan, Uashat mak Mani-utenam, Unamen Shipu et Wemotaci existent bel et bien et ne se situent pas dans un monde parallèle. Les Abénakis, Anishnabe (Algonquins), Atikamekw, Cris, Hurons-Wendat, Innus (Montagnais), Inuits, Malécites, Micmacs, Mohawks et Naskapis sont bien vivants et souhaitent une réconciliation, un rapprochement avec les autres peuples, les Acadiens, les Québécois, les nouveaux arrivants…
Le moment n’est-il pas venu de mieux se connaître et de se découvrir ? Quelle belle occasion de tisser des liens d’amitié avec des représentants de divers peuples autochtones en se réchauffant à même le feu sacré en face d’un tipi érigé pour l’occasion à Fermont par des Innus de Uashat. Les astres semblent alignés sous un ciel d’aurores boréales. Nous ne réécrirons pas l’histoire et il n’est pas question de l’effacer, mais nous pouvons contribuer à dessiner l’avenir sur la mère nourricière, la Terre, qui est notre maison commune.
Innu signifie « être humain » dans la langue innue. Nous avons déjà un lieu commun, le territoire que nous habitons, voici maintenant un lien qui nous unit « mamou ». Ensemble, il est temps de créer un pont entre nous. Les Premières Nations ne sont pas folkloriques, mais bien vivantes avec leurs langues, leurs cultures et leurs traditions. L’influence des Amérindiens et des Inuits ne se limite pas au canot d’écorce, aux traîneaux à chiens, à la crosse (l’ancêtre du hockey sur glace), aux épis de maïs sucré, à la raquette, au sirop d’érable et au toboggan.
Le préfet de la MRC de Caniapiscau et maire de Fermont, Martin St-Laurent, qui a accompagné le convoi en motoneige lors de son départ de Fermont jusqu’à un cimetière innu situé au lac Ashuanipi à 140 km de sa localité, était enchanté d’accueillir ces ambassadeurs. Il considère que c’est un grand honneur d’avoir reçu cette expédition inspirante qu’il a décrite lors de son allocution comme une « aventure remarquable qui vise à promouvoir la réconciliation communautaire, culturelle, sociale et spirituelle entre les peuples autochtones et allochtones. Nous avons été honorés de faire partie de cette initiative qui porte un message de paix, d’harmonie et de guérison à travers les communautés. »
Réconciliation entre peuples
Une grande aventure spirituelle à motoneige
L’Expédition des Premières Nations 2023 est un événement historique rassembleur d’envergure imaginé et créé par des hommes et des femmes autochtones du Québec afin de montrer qu’ils ont été très touchés par les récents événements que vivent leurs peuples à l’échelle du pays. L’organisation de cette grande aventure à motoneige avait également pour objectif d’amorcer une campagne publique de sensibilisation au sujet du sort qui leur est réservé. La démarche visait aussi à rendre hommage aux enfants des pensionnats « indiens » et aux femmes autochtones assassinées ou disparues ainsi qu’à la mémoire de Joyce Echaquan.
Ce trajet à motoneige hors-piste totalisant un parcours enneigé ardu de plus de 4200 kilomètres a regroupé près de 60 participants issus des nations anishnabe (algonquine), atikamekw, crie, innue, naskapie et québécoise. Les motoneigistes ont sillonné l’immense parcours avec l’intention de mettre en commun les connaissances culturelles des différents occupants du territoire à travers un défi de taille et un objectif conjoint où des valeurs telles que l’amour, la bravoure, le courage, l’entraide, la force, l’harmonie, la persévérance et le respect ont été de mise. De plus, un message d’espoir pour la jeunesse ainsi que de réconciliation et de paix, dans le grand respect de mère Terre, porté par les femmes durant le périple aura rapproché les différents peuples du Québec autour du feu sacré en les incitant à trouver des solutions afin de les guider vers une réconciliation durable.
Selon l’instigateur de cette épopée nordique, Christian Flamand, dont la motoneige a éprouvé des difficultés mécaniques avant de prendre feu alors qu’il était en route vers le village cri de Waskaganish à l’embouchure de la rivière Rupert (Baie-James), cette portion sur la banquise de la baie James jusqu’à Chisasibi a été la plus périlleuse. La plupart des participants du cortège nordique ont dû contourner les rochers, la glace, les détroits et les tourbillons de la forêt en plus de devoir composer avec de nombreux bris mécaniques dans ce secteur. Les bosses incessantes ont même eu raison de plusieurs attelages en acier de traîneaux tirés par les motoneiges.
L’organisateur principal, un ancien commando du régiment aéroporté canadien (Airborne), explique que le froid était extrême et le danger omniprésent. « Ce voyage extraordinaire vers la guérison a permis aux participants de prendre conscience de leur appartenance à leur communauté pour lesquelles l’expérience aura permis de renouer avec la vie sur leurs territoires traditionnels comme des rassemblements sur le Nitaskinan (notre terre) pour les Atikamekw. L’amour pour les diverses communautés autochtones que visait cette expédition a démontré une ouverture vers un avenir très prometteur pour les Premières Nations. » M. Flamand a été ému de l’accueil chaleureux que les participants ont reçu dans les diverses communautés visitées et de la fierté qu’il y a perçue.
À la fin de la traversée de cette gigantesque terre ancestrale, les participants de cette odyssée unique au monde, qui a commencé à Manawan, ont été accueillis en héros par la population de Uashat mak Mani-utenam (Sept-Îles), leur destination finale, le 4 mars dernier. Cette excursion sur ces territoires traditionnels restera gravée dans la mémoire collective pour les décennies à venir.